CHIRURGIE DES VOIES BILIAIRES ET DU PANCREAS

Etudie l'ensemble des pathologies siégeant au niveau des voies excrétrices de la bile et du pancréas. Ces deux organes, de par leurs indications anatomiques, ont souvent des modes d'expression communs qui vont demander des gestes chirurgicaux intriqués.

I- DONNES ANATOMIOUES
Voies biliaires principales et accessoires, et pancréas, sont des organes de la partie supérieure de l'abdomen, en position profonde.
Le pancréas surtout est en position rétro-péritonéale du fait des accolements des autres organes de voisinage.
Voies biliaires et pancréas sont intriqués par leurs rapports anatomiques et leurs vascularisations communes.

A- Anatomie descriptive

1- Les voies biliaires
· Les canaux hépatiques droit et gauche. Les 2 parties du foie contenant chacun 4 segments sont indépendant entre eux et ceux à tous les niveaux (Artères, veines,…).

· Le canal hépatique commun qui reçoit sur son bore droit la voie biliaire accessoire : vésicule biliaire et canal cystique,

· En aval de la convergence avec le canal cystique la voie biliaire principale devient le canal cholédoque auquel on décrit trois positions :
- Une position libre, pédiculaire, au-dessus du premier duodénum,
- Une portion rétro-duodénale,
- Une portion intra-pancréatique dans laquelle le canal circule à l'intérieur du tissu pancréatique dont il est chirurgicalement non individualisable.

· La voie biliaire principale a un diamètre interne de 3 à 8 mm à l'état normal. Son diamètre est considéré comme pathologique lorsqu'il est égal ou supérieur à 10 mm (données échographiques),

· Le cholédoque se jette dans le tube digestif en général sur le bord gauche du deuxième duodénum par un orifice commun avec le canal de Wirsung : l'ampoule de Water. Cet orifice est muni d'un sphincter lisse : le sphincter d'Oddi.
Par voie endoscopique, l'ampoule de Water est repérée par un repli de muqueuse duodénale : la caroncule.

· La voie biliaire accessoire comprend la vésicule biliaire dont le fond est accolé à la face inférieure du foie et dont l'infundibulum se poursuit par le canal cystique.


2- Le pancréas
C'est une glande à double potentiel fonctionnel, exocrine, dont les sécrétions qui se vident dans le canal de Wirsung interviennent dans la digestion, et endocrine dont les hormones interviennent dans la régulation de la glycémie. Les cellules à potentiel hormonal siègent préférentiellement au niveau de la partie distale de la glande.

On décrit cette glande :
· la tête, chirurgicalement individualisable du cadre duodénal,
· le corps, situé en avant de l'aorte abdominale,
· la queue au contact du hile de la rate.

B- Les artères
On trouve le tronc cœliaque avec les artères hépatique et splénique ainsi que les artères duodéno-pancréatique, mésentérique supérieur et des cercles anastomotiques.

C- Les veines
Le plan veineux est en arrière du bloc duodéno-pancréatique. Il se compose de la veine splénique, mésentérique supérieur et mésentérique inférieur pour déboucher sur la veine porte. Cette convergence rend impossible l’exérèse d’un cancer impossible. On peut les examiner par echo-endoscopie.

D- Les lymphatiques
Anastomoses riches à l'intérieur du parenchyme pancréatique et de la paroi des voies biliaires expliquant la dissémination rapide des cancers.
· Les drainages lymphatiques sont ensuite parallèles aux axes vasculaires.
· Au niveau du fond de la vésicule existe un drainage lymphatique direct vers le foie.

E- Les nerfs
· Faible importance chirurgicale.
· L'envahissement postérieur des cancers pancréatiques pouvant conduire à des résections nerveuses postérieures à visée antalgique (sphinctérotomie).

F- Les voies d'abord
· Médiane sus ombilicale.
· Mais surtout sous costale droite ou bi-sous-costale.
· Depuis quelques années, techniques cœlioscopiques possibles pour les voies biliaires.

II- RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
· La bile est sécrétée par le foie et excrétée par la voie biliaire vers le tube digestif où elle intervient dans la digestion des lipides. La sécrétion quotidienne est de l'ordre de deux litres par jour.

· Chez le sujet normal, si la sécrétion est quasi-constante sur 24 heures, l'excrétion dépend de l'ouverture du sphincter d'Oddi (par commande endocrinienne). La bile est stockée dans la vésicule biliaire qui se contracte lors de la digestion en parallèle avec l'ouverture d'Oddi. Si la vésicule est malade il y a accumulation de bille qui mène à des calculs dans ce cas il faut faire une cholécystectomie. C’est la voie biliaire principale qui prend le relais en ce distendant.

· Le pancréas exocrine sécrète amylase (digestion des glucides) et lipase (digestion des lipides) (tête et corps); le pancréas endocrine (directement dans le sang) sécrète insuline et glucagon. Lors des exérèses pancréatiques on cherche à conserver la queue du pancréas pour éviter un diabète.

III- LE BILAN
A- Biologique
Va mettre en évidence, et de façon différentielle selon la pathologie observée :
· Un syndrome infectieux :
- VS augmentée,
- Hyper leucocytose,
- PCR,
- Hémoculture.
· Un syndrome rétentionnel hépatique :
- Bilirubine augmentée,
- Phosphatases alcalines augmentées,
- Gamma GT augmentées alors qu'il n'existe au début ni cytolyse (transaminases) ni insuffisance hépatique (T.P.)
· Un syndrome de souffrance pancréatique
- Lipase augmentée ++ (théoriquement le dosage de la lipase est plus fiable)
- Amylase augmentée

B- Iconographique
· Echographie qui évalue l'état et le contenu de la vésicule, le diamètre de la voie biliaire principale, le parenchyme hépatique, le pancréas (difficile à étudier car profond).

· Scanner qui étudie le parenchyme hépatique et le pancréas. Permet la recherche de tumeur du pancréas ou de métastases ou d’abcès du foie.

· Bili-IRM étudier la voie biliaire. Ne nécessite pas l’injection. C’est l’étude des contrastes des sucs biliaires.

· Cholécystographie par voie orale (ingestion par voie orale d'un produit opaque qui est concentré au niveau du foie, excrété dans la bile et qui permet de visualiser radiologiquement la voie biliaire).

· Cholangiographie intraveineuse (injection par voie veineuse d'un produit iodé excrété par la bile et qui permet-de visualiser radiologiquement la voie biliaire).

Ces deux techniques ne sont possibles que s'il n'existe pas de signe biologique de rétention biliaire :
Opacification de la voie biliaire principale et/ou du Wirsung par voie rétrograde par cathétérisme endoscopique de l'ampoule de Water. Ces examens ne sont bien sûr par systématiques mais indiqués selon le contexte clinique.

C- Endoscopique
· Endoscopie oeso-gastro-duodénale à la recherche d'une pathologie associée ou d'un retentissement duodénal d'une pathologie de voisinage.

· Echo-endoscopie, technique nouvelle et très prometteuse qui permet de mettre la sonde d'échographie au plus près des structures à étudier et donc de diminuer au maximum le parasitage par les autres organes. Elle permet la ponction qui est difficile à réaliser. On fait avaler l’écho endoscope, on repère la lésion et on ponctionne la lésion pour déterminer la pathologie.

D- Le patient
· Bilan général. Pathologies associées.
· Retentissement nutritionnel.
· Bilan pré-opératoire.

IV- LA LITHIASE VESICULAIRE
Déf. : C’est la présence de calcul formé de sel biliaire dans un point quelconque de la voie biliaire. Si ils sont petits, ils peuvent migrer dans le canal cystique. Chez les gens chez qui on a ôté la vésicule biliaire, il peut y avoir un calcul mais c’est le plus souvent un calcul de la vésicule « oublié ». L’évolution peut être progressive ou brutale.

A- La colique hépatique
· Douleur de l'hypochondre droit ou épigastrique, intense, bloquant la respiration, à irradiation scapulaire postérieure.
· A l'examen, douleur à la décompression de l'hypochondre droit.
· A ce stade, le bilan biologique est normal et l'échographie met en évidence une ou plusieurs lithiases vésiculaires.
· Le traitement est médical (antispasmodique). On sait qu’en théorie un calcul de plus de 2 cm durant plus de 20 ans augmente énormément le risque de cancer.

B- Cholécystite chronique
· Répétition des crises de colique hépatique avec petits troubles digestifs et sensibilité douloureuse plus ou moins permanente de l'hypochondre droit.
· Biologie normale.
· Lithiase à l'échographie.
· Indication de cholécystectomie avec contrôle radiologique per-opératoire de la voie biliaire principale, le plus souvent sous cœlioscopie. On sait qu’il a 5% de calcul asymptomatique de calcul.

C- Cholécystite aigüe
Crise de colique hépatique, soit inaugurale, soit dans un contexte de cholécystite chronique, mais avec fièvre (infection) et vomissements (irritation péritonéale).

1- Biologiquement
· Hyper leucocytose (phosphatase alcaline +/- augmenté, bilirubine +/- augmenté).
· Souvent petit syndrome de rétention biliaire.

2-Échographie
· Lithiase vésiculaire.
· Augmentation de volume de la vésicule.
· Epaississement des parois vésiculaires.
· Vérifie l’absence de calcul cholédoque.

3- Thérapeutique
· traitement médical
- Glace sur le ventre,
- Antibiothérapie,
- Arrêt de l'alimentation.
· traitement chirurgical
- Dans l'idéal après 24 à 48 heures de traitement médical, soit par cœlioscopies, soit, si les signes généraux sont péjoratifs, par chirurgie classique.
- Cholécystectomie avec contrôle radiologique de la voie. biliaire plus drainage de la région sous hépatique.

D- La migration cholédocienne
Passage d'un calcul de la vésicule vers le cholédoque.

1- Cliniquement
Triade symptomatique évoluant sur 24 - 48 heures.
· Douleur.
· Fièvre.
· Ictère (bien visible).
· Selles décolorées, urines foncées.

2- Biologiquement
· Syndrome infectieux.
· Syndrome de rétention biliaire (phosphatase alcaline +/- augmenté, bilirubine +/- augmenté).
· Syndrome d'insuffisance hépatique (TP diminué, transaminase augmenté) et une altération de la fonction rénale (créatinine augmentée, azotémie augmentée, diurèse diminuée) sont des signes de gravité.
· hémoculture quelques fois positive.

3-Échographie
· Lithiase vésiculaire.
· Dilatation des voies biliaires intra et extra hépatiques.
· Présence de calcul dans la voie biliaire principale.

4- Conduite à tenir
Deux cas :
· Sujets jeunes, en bon état : traitement chirurgical d'emblée par laparotomie sous couverture antibiotique :
- Cholécystectomie.
- Ouverture du cholédoque pour extraire le ou les calculs.
- Fermeture du cholédoque après mise en place d'un drain de Kehr en T dans la lumière du cholédoque. La longue barre du T est extériorisée à la peau par une contre-incision.
- La poche de réceptacle biliaire est laissée en position déclive pendant huit à dix jours, puis progressivement remontée au niveau y du plan du lit pour diminuer le drainage par siphonnage et remettre la voie biliaire en charge. En l'absence d'obstacle intra-cholédocien résiduel le débit par le drain doit diminuer.
- Au dixième, douzième jour, contrôle radiologique opaque par le drain.
- Si pas d'obstacle biliaire, le drain est clampé 24 heures après le contrôle radiologique et un bilan biologique hépatique doit être normal 48 heures après le clampage.
- Si c'est le cas, et en l'absence de syndrome infectieux, le drain de Kehr est oté par traction en un temps, la fermeture de la brèche cholédocienne se faisant par fermeture du trajet fistuleux péri-tubulaire sur elle-même.
- Si obstacle radiologique lors du contrôle, ou altération du syndrome biologique de rétention biliaire, ou fièvre, ou douleur dans les suites du clampage, le drain de Kehr doit être remis en siphons pour drainer la bile et une irrigation biliaire par le drain ou un geste endoscopique discutés.

· Sujet âgé, en mauvais état général avec fonction rénale altérée :
Sphinctérotomie :
- Endoscopique en urgence sous antibiothérapie pour libérer l'écoulement biliaire,
- puis, secondairement,
- cholécystectomie si l'état général le permet.

E- Empierrement choledocien
· Souvent découverte lors d'un épisode aigu, fébrile, d'une poly-lithiase de la voie biliaire principale dans un cholédoque très dilaté.
· Un geste endoscopique peut ne pas être suffisant.
· Un geste chirurgical de dérivation bilio-digestive s'impose (anastomose cholédoco-duodénale).

V- LES ICTERES NUS
· Très souvent synonyme d'ictère par cancer de la voie biliaire ou de la tête du pancréas.
· Ictère progressivement foncé sans douleur ni fièvre, avec prurit fréquent.
· Biologiquement, syndrome de rétention biliaire et secondairement de souffrance hépato-cellulaire.

A l'échographie, dilatation des voies biliaires intra et extra hépatiques selon la topographie de l'obstacle comprimant ou infiltrant la voie biliaire principale.

L'écho endoscopie ou le scanner vont localiser l'obstacle et préciser l'état régional (ganglions, métastases).
· Schématiquement, c'est souvent lors de l'intervention que le bilan lésionnel et l'attitude thérapeutique seront définitifs.
- Petite lésion peu envahissante : chirurgie d'exérèse (duodéno-pancréatectomie céphalique ).
- Lésion "carcinologiquement dépassée" : dérivation biliaire.
· Soit bilio-digestive.
· Soit prothèse shuntant l'obstacle.
· Soit prothèse trans-tumorale.
Pronostic très sombre des ictères néoplasiques en raison de l'envahissement ganglionnaire régional.

VI- LES ASPECTS CHIRURGICAUX DES PANCREATITES CHRONIQUES
Formes douloureuses :
· Exérèse.
Formes kystiques
· Dérivations kysto digestive.

Quelque soit l’indication de la chirurgie pancréatique :
· Chirurgie d’exérèse techniquement difficile.
· Chirurgie de reconstruction à risque de fistules (multiples anastomoses), risque de diabète si exérèse.